15 janvier 2019

Prise de parole / Avis d'experts

Retrouvez ici l’article rédigé par notre Directeur Associé Patrick VIALLANEX et publié par The Daily Finance le 7 janvier 2019.

 

Dans le prolongement de la COP21, puis de la COP24, la SNBC est la feuille de route de la France pour piloter l’atténuation des risques liés au réchauffement climatique, dont la réduction des émissions de GES, qu’il est prévu de faire varier d’environ -15% entre 2015 et 2023 ; la neutralité carbone est également visée, pour 2050.

 

Les objectifs de court et moyen terme de la SNBC française, sont définis et suivis à l’aide des budgets carbone, qui sont présentés comme des « plafonds d’émissions de gaz à effet de serre à ne pas dépasser au niveau national sur des périodes de cinq ans, exprimés en millions de tonnes de CO2 équivalent ». Leur révision se profilerait de la façon suivante :

 

Les budgets-carbone s’appuient sur un scénario de référence qui « met en évidence des mesures de politiques publiques, en supplément de celles existant aujourd’hui, qui permettraient à la France de respecter le mieux possible ses objectifs climatiques et énergétiques à court, moyen et long-terme » :

 

Source : Projet Stratégie Nationale Bas Carbone – Version complète

 

La répartition sectorielle des 1er (2015-2018) et 2nd (2019-2013) budgets-carbone n’accorderait pas de réduction des émissions de GES au secteur de l’industrie de l’énergie (48 MtCO2eq), alors que celui des transports (plus gros émetteur de CO2) verrait son quota se réduire de 5% à 128 MtCO2eq, et que le secteur du résidentiel tertiaire verrait le sien reculer de plus de 15% pour se porter à 77 MtCO2eq :

 

Source : Projet Stratégie Nationale Bas Carbone – Version complète

 

En 2050, l’objectif de neutralité carbone serait atteint, notamment en compensant les émissions de gaz à effet de serre par la création de « puits de GES », qui résulteraient de la gestion raisonnée des terres (forêts et bois) et de la capture et du stockage de carbone :

 

Source : Projet Stratégie Nationale Bas Carbone – Version complète

 

La fonction « Investissement » est naturellement mobilisée pour atteindre les objectifs de la SNBC ; plusieurs outils ont déjà été créés pour « inciter les acteurs financiers à mieux prendre en compte les risques liés au changement climatique et à réorienter des flux financiers publics ou privés vers des actions cohérentes avec l’Accord de Paris » :

L’article 173-VI de la loi de transition énergétique pour la croissance verte (décembre 2015) : la France est devenue pionnière en obligeant les investisseurs à prendre en compte la lutte contre le changement climatique dans leurs stratégies d’investissements ;

L’émission de l’obligation verte souveraine (janvier 2017) : avec un encours s’élevant à environ 15 MM€, cette émission permet d’établir des standards élevés au sein du marché des obligations vertes, notamment via le reporting d’impact environnemental qu’elle permet ;

Les Labels « finance verte » : ils permettent de mieux cibler les projets qui contribuent à la transition énergétique et écologique (TEE) et d’avoir une garantie quant à la qualité verte des investissements, avec :

Le Label « transition énergétique et écologique pour le climat » (TEEC)(décembre 2015) : ciblant les fonds d’investissements verts, il garantit la transparence et l’engagement environnemental des produits financiers, et a pour objectif d’accroître les investissements au bénéfice de la transition énergétique et écologique, et de la lutte contre le changement climatique ;

Le Label « Financement participatif pour la croissance verte » (fin 2017) : il valorise le financement participatif de projets œuvrant en faveur de la TEE.

 

De plus, comme précisé dans le texte du projet de révision de la SNBC, de nombreuses initiatives ont été lancées pour mobiliser les acteurs financiers internationaux :

Engagements du Climate Finance Day :

Verdissement de l’assurance-vie (loi Pacte) ;

Fléchage de l’épargne placée sur le Livret développement durable et solidaire (LDDS) vers des projets contribuant effectivement à la transition énergétique ou à la réduction de l’empreinte climatique du modèle économique français ;

One Planet Summit : engagement de 237 entreprises, représentant une capitalisation boursière de plus de 6,3 MM$, à suivre les recommandations de la Task Force on Climate-Related Financial Disclosures (la TCFD incite à un reporting extra-financier de type article 173-VI) ;

Coalition 100+ par 225 investisseurs dont l’objectif est d’inciter les 100 entreprises cotées les plus émettrices de gaz à effet de serre à agir contre le changement climatique ;

Engagement de 6 fonds souverains à intégrer le changement climatique dans leurs décisions d’investissements ;

Réseau de finance verte fédéré autour de la Banque de France rassemblant 8 banques centrales et plusieurs autorités des marchés financiers représentant plus d’un tiers des actifs financiers mondiaux et des émissions de carbone (depuis le lancement, le groupe s’est élargi et compte aujourd’hui 15 membres, dont des observateurs) ;

« Finance for Tomorrow » portée par les acteurs de la place de Paris, permet de bien structurer l’écosystème financier vert et de valoriser la finance durable française à l’international.

 

Par ailleurs, le changement climatique étant un problème mondial, les pays développés, dont la France, se sont engagés dans le cadre de la CCNUCC à mobiliser 100 milliards de dollars par an de financements climat de 2020 à 2025 en faveur de l’action climatique dans les pays en développement.

 

Dans le cadre de la SNBC, la stratégie « Investissement » est conditionnée par 4 orientations spécifiques et des indicateurs associés, qui permettent de suivre l’atteinte des objectifs d’investissement :

 

Des indicateurs de résultats (niveau d’investissements en faveur du climat, y compris répartition sectorielle et entre acteurs privés et publics, et écart au besoin identifié dans l’évaluation macro-économique) et des indicateurs de contexte associés (prix du pétrole brut en moyenne annuelle, et prix des quotas dans l’ETS) permettront également de piloter la contribution de l’Investissement aux objectifs de la SNBC.

 

Les investisseurs institutionnels étant directement concernés par la SNBC, ceux-ci pourront utiliser sa nouvelle feuille de route pour piloter la trajectoire 2 degrés de leurs portefeuilles, en adossant cette dernière aux objectifs précis de la France ; cette démarche, particulièrement appropriée pour les investisseurs œuvrant pour l’intérêt général (institutions publiques, caisses de retraite, …), pourrait par exemple consister à :

Suivre la dynamique des émissions annuelles moyennes (en Mt CO2eq) de leurs portefeuilles d’actifs, et la comparer à celle des émissions nationales programmées dans les 2ème, 3ème et 4ème budgets-carbone nationaux ;

Ajuster cette dynamique en tenant compte des secteurs des terres et de la forêt (permettant la compensation par la création des « puits de GES ») ;

Ventiler cette dynamique au regard des différents secteurs et de leurs objectifs spécifiques précisés dans la SNBC ;

Utiliser les indicateurs officiels de la SNBC des orientations 1 et 2 pour apprécier les risques de transition ;

Utiliser les indicateurs officiels de la SNBC des orientations 3 et 4 pour repérer :

Les investissements verts les mieux adaptés à la contribution à la transition écologique et énergétique ;

Les investissements allant à l’encontre des objectifs des Accords de Paris.

Mots clés :
Finance responsable
Finance verte
Investisseurs
SNBC
Stratégie Nationale Bas Carbone

Articles liés